L’affaire Ebony : jusqu’où ça va aller ?
Ebony, ça vous dit quelque chose ? Non ? Si on vous parle d’une candidate de la Star Academy, victime de racisme et de misogynoir, ça vous parle un peu plus ? On décrypte ensemble cette affaire qui met en lumière les dérives racistes et sexistes encore bien présentes dans notre société.
Écrit par Erine Viallard le

Ebony, 20 ans, est devenue la première candidate noire à atteindre la finale de la Star Academy (go girl !). Mais, depuis le lancement de la saison, la jeune femme a fait face à une vague de haine en ligne sans précédent... Et ce, malgré son talent et la bienveillance de surface de l'émission.
Sous les publications de la Star Academy sur Instagram - ou sous des posts d'elle sur les autres réseaux - on y lit des commentaires inadmissibles en 2025 : "Pas la guenon en finale", "Eh c’est bon, on en peut plus de la singeresse", ou encore "Ebony tu chantes faux, dégage la noire de merde". Des attaques à la fois racistes, sexistes et hypersexualisées, qui illustrent les pires clichés sur les femmes noires.
Face à ce torrent de violence, l’affaire Ebony ne se limite pas à une simple polémique télévisée : elle est devenue le reflet des dérives racistes et sexistes qui gangrènent les réseaux sociaux et, plus largement, notre société française.
« Le racisme envers Ebony et Franck n’existe pas » #StarAcademypic.twitter.com/GKGPD0ruvJ
— vt (@xaveberet) January 25, 2025
Une vague de haine en ligne
Les attaques contre Ebonyont débuté tôt dans l’émission, notamment sur les réseaux sociaux. Comparée à un singe ou rabaissée en raison de sa couleur de peau, dès son entrée au château, elle est devenue la cible favorite des internautes enragés.
Un cas isolé ? Pas réellement en fait. Si les attaques des netizens peuvent choquer - d’autant plus que la jeune fille d'à peine 20 ans n'a rien demandé - pour beaucoup, elle est l'illustration parfaite du racisme systémique français. Un terme est beaucoup revenu ses derniers jours pour parler de l'affaire Ebony : la misogynoir, soit unedouble discrimination raciale et sexiste théorisée en 2008 par Moya Bailey. Jugée arrogante, accusée de faire sa "diva", ces critiques font écho aux stéréotypes régulièrement attribués aux femmes noires lorsqu’elles osent occuper l’espace public avec assurance. À cela s’ajoute une hypersexualisation constante, où Ebony a été réduite à son apparence physique plutôt qu’à son talent, renforçant des dynamiques de déshumanisation dans l’imaginaire collectif.
Ces attaques, qu’elles soient racistes, sexistes ou hypersexualisées, révèlent une réalité alarmante sur le traitement réservé aux femmes noires dans les médias.
Une réponse des institutions
En réaction, TF1 et Endemol - la société de production de l’émission - ont publié un communiqué le 23 janvier dernier pour dénoncer une "campagne de haine" et annoncer leur intention de poursuivre en justice les auteurs des commentaires racistes et sexistes. Mais pour les internautes, il n'est pas suffisant, pour cause : l’absence du mot "racisme" pose problème - quand l'on sait que la finaliste en est victime.
SOS Racisme quant à lui, a adopté une position plus ferme. L’association a déposé plainte contre les auteurs des propos haineux tout en exprimant son soutien public à Ebony. Dans son post Instagram, SOS Racisme rappelle l’urgence de lutter contre ces attaques et dit avoir"signalé ces attaques racistes auprès du Procureur de la République du Tribunal judiciaire de Paris".
Pour rappel, le racisme en France est un crime et est puni par la loi. Comme toutes les autres formes de discrimination, il n'a pas sa place dans le quotidien (et surtout pas sous des posts Instragram).
Soutenue par la Star Ac, Ebony fait passer un message durant un prime
Cette haine et ces critiques, Ebony a choisi de s'en servir, au lieu de les subir. Lors du prime de la demie finale, elle a interprété avec émotion "Ne me jugez pas" de Camille Lellouche, entouré de la troupe de danseuse "descendantes et combattantes". Ce moment, à la fois poignant et puissant, a marqué les esprits. La jeune fille en a profité pour déclarer avec dignité que "Quand on est une femme noire [...] dans la société, la vie n’est pas la même que pour les autres".
Cette chanson, c'était aussi une prise parole pour toutes les petites filles noires, afin de transmettre un message d’espoir : "J’espère que les petites filles noires ont entendu ce message, et qu’elles n’écoutent pas les critiques. J’espère qu’elles sont fières de leur couleur de peau, de leurs cheveux et de là où elles viennent". À travers ces mots, Ebony a su transcender les attaques et incarner une source d’inspiration.
Une société divisée
Les réseaux sociaux ont joué un rôle central dans l’affaire, amplifiant à la fois la haine et le soutien. Sous le hashtag #StarAcademy, les torrents de haine ont côtoyé une mobilisation massive en faveur d’Ebony, notamment sous le hashtag #TeamEbony. Et comme dans beaucoup d’affaires médiatiques, certains internautes ont brandi l’argument du "racisme anti-blanc", accusant les soutiens d’Ebony de stigmatiser les Blancs. Pourtant, ce discours inverse les rôles et minimise la réalité du racisme systémique.
Heureusement, des figures publiques se sont fermement levées pour soutenir Ebony. Des influenceurs comme Yannsiton, jusqu’à des stars telles que la célèbre Aya Nakamura, ont pris position sur leurs plateformes pour appeler à la solidarité. Leur engagement montre qu’un contre-discours fort peut émerger et créer une onde de soutien face à la haine.
@ebonyslovrs toutes les célébrités, influenceurs, artistes qui soutiennent ebo star. ★ ( il y’a encore plein d’autres personnes ) | votez 1 au 71500 vous pouvez votez plusieurs fois! #staracademy#staracademy2024#ebony#starac#staracademylelive#edit#edits#celebrity#artistes#influencer#staracademyedit#bonitas#ebonyenfinale♬ son original - ebonyslovrs
En bref, l’affaire Ebony expose un fait : en France, le racisme et la misogynoir restent profondément enracinés dans les mentalités et les discours. Les attaques qu’Ebony a subies ne sont pas de simples dérapages isolés, ce sont la preuve que les femmes noires subissent une double discrimination : celle de leur couleur de peau et de leur genre. Une double peine qui devrait plutôt être attribués aux haters.