Interrompues, sous-évaluées, menacées : quand le sexisme se paie au prix fort en Espagne
Elles se font interrompre en réunion, elles doivent justifier leur place au sommet et elles risquent leur vie juste parce qu'elles existent. En Espagne, une campagne de sensibilisation a décidé de résumer tout cela sur un ticket de caisse. Et autant vous dire que la note est salée.
Écrit par Camille Croizé le

Le 8 mars dernier, les habitantes et habitants de Zamora en Espagne, ont découvert une campagne d'affichage choc imaginée par l'agence Alto El Fuego : un immense ticket de caisse listant toutes les injustices que les femmes subissent au quotidien."On ne te croit pas quand tu dis que c'est toi la cheffe", "C'est toi qui achètes tous les cadeaux d'anniversaire", "Le juge te juge plus que ton agresseur"... Un enchaînement de réalités qui, une fois assemblées, révèlent le coût d’être une femme. L'idée ? Montrer que ce coût n'est pas qu'une question d'argent (même si la fameuse "pink tax" est bien réelle). Le patriarcat nous prélève aussi du temps, de l'énergie, de la santé mentale, et parfois, la vie.
Combien coûte le patriarcat aux femmes ?
Si la campagne fait autant réagir, c'est parce qu'elle met le doigt sur une vérité que beaucoup refusent encore de voir : être une femme est une lutte permanente. Que ce soit dans l'espace public, au travail, dans les foyers ou devant la justice, les femmes doivent constamment prouver leur valeur, leur crédibilité et leur droit à la sécurité.
Quand une femme dénonce une agression, elle est scrutée, décrédibilisée, alors que l'agresseur, lui, peut souvent compter sur la présomption d'innocence. Quand une femme accède à un poste à responsabilité, elle doit se battre contre le syndrome de l'imposteur (et les remarques sexistes). Quand une femme devient mère, c'est à elle que revient encore la majeure partie des tâches domestiques.
Bref, la facture s'allonge et personne n'est là pour proposer un remboursement.
"On est allées trop loin" ? Vraiment ?
Bien sûr, cette campagne ne fait pas l'unanimité. Comme toujours, les "anti-féministes de service" se sont empressés de dégainer leur refrain : "Les femmes exagèrent", "Elles vont trop loin", "On ne peut plus rien dire", ou encore - l’une de préférée - “À ce niveau-là, elles veulent être supérieures aux hommes, pas égales”
Mais la question se pose : qu'est-ce qu'on demande de si excessif, au juste ? Avoir les mêmes droits ? Être crues quand on parle ? Ne pas être tuées par nos partenaires ? Demander à la justice de faire son travail ? Si c'est ça, "aller trop loin", alors clairement, on n'est pas allées assez loin.
Une addition qu'on refuse de payer
Ce ticket de caisse symbolique nous rappelle quetant que le patriarcat existera, être une femme aura un coût. Mais le fait même que cette campagne dérange prouve qu'elle tape juste. Si les réactions sont vives, c'est bien parce qu'elle met en lumière un système qui préfère rester dans l'ombre. Alors non, on ne laissera pas passer l'addition sans broncher. Et tant pis si ça dérange.