Rien ne va plus : Shein et Temu sont les sites de mode les plus consultés en France
Une fois de plus, Shein et Temu font débat (et pas pour les bonnes raisons). Mise en abîme d’une consommation destructrice qui ne manque pas de triompher parmi les géants de l’e-commerce français. Entre stratégies problématiques et désastre écologique, on explique une fois de plus tout ce qui ne va pas avec ces deux noms de l’ultra fast-fashion.
Écrit par Téa Antonietti le
On souffle. Aujourd’hui et plus que jamais, la tentation vers une consommation plus accessible règne dans la moindre démarche d’achat. Il suffit de chercher une paire de chaussettes, un repose-pied ou un mug chauffant (vous avez quoi, 80 ans ?) dans la barre de recherche pour trouver les trois produits au même endroit, à des prix imbattables. Sous les noms bien connus de Shein et Temu, les géants chinois prônent l’ultra fast-fashion, une consommation des plus excessives qui, en d’autres termes, vise à acheter mal, plus encore.
Le plus effrayant avec ces sites, c’est l'appât qu’elles exercent depuis nos écrans, avec une audience de taille sur les réseaux sociaux pour encourager une clientèle jeune et insouciante à succomber à leurs offres alléchantes. Comme une trend TikTok, les hauls Temu et les unboxing Shein sont devenus des contenus incontournables de la plateforme, avec des liens directs vers la consommation massive. Alors que la préoccupation environnementale et éthique n’a jamais été aussi présente dans le débat public, - on pense à la loi sur la fast-fashion qui vise à taxer sa consommation démesurée - la popularité de ces géants chinois met le doigt sur une contradiction peu évidente : celle d'une société qui se veut responsable tout en soutenant des modèles économiques destructeurs.
Un bilan de la France (très) inquiétant
Les chiffres sont accablants. Au premier plan de cette catastrophe : Shein et Temu, deux géants chinois de l'ultra fast-fashion, qui se sont sereinement installés aux côtés des sites les plus fréquentés en France. D’après un récent rapport de la Fédération du e-commerce (Fevad), Shein occupe désormais la dixième place des sites les plus visités dans l’hexagone, avec 14,1 millions de visiteurs mensuels, juste derrière des acteurs historiques tels que Cdiscount et Carrefour. Son redoutable rival (tout aussi dangereux que lui), Temu, récolte une fréquentation mensuelle de 15,7 millions d’internautes. Depuis son lancement en 2022, la plateforme savoure un succès fulgurant, avec des prix défiant toute concurrence qui invite à la consommation facile.
Les sites chinois figurent aux côtés d’Amazon et Leboncoin
C’est officiel : Shein et Temu s'installent en géants de l’e-commerce avec un ancrage auprès des mastodontes que sont Amazon, Leboncoin et Vinted. Si le trio de tête reste inchangé avec Amazon en leader (36,8 millions de visiteurs uniques mensuels) suivi de Leboncoin et Booking, la montée en puissance des sites chinois se distingue considérablement sur le marché.
Une performance triomphante qui n’a rien d’anodine en sachant la capacité de Shein et Temu à offrir une quantité astronomique de produits (jetables et non durables) à des prix dérisoires. Une stratégie massive au bilan éthique comme écologique désastreux, qui a totalement bouleversé le secteur du textile.
Pourquoi les Français continuent de consommer Shein et Temu ?
La question qui fâche. Mais alors pourquoi, malgré une prise de conscience croissante, les Français continuent-ils d’acheter sur Shein et Temu ? La réponse se trouve dans les prix. Avec une méthode imbattable qui consiste à proposer des articles à prix mini (on parle parfois en centimes pour Temu), livrés dans des délais records, les plateformes s’imposent comme la solution facile pour assouvir en un rien de temps (et à pas cher) une forte demande de produits accessibles.
Ce phénomène de surconsommation réside notamment auprès des jeunes, séduits par un marketing massif sur les réseaux sociaux, TikTok en premières loges de cette promotion agressive. De quoi facilement oublier que derrière cette attractivité économique se cache une réalité bien plus sombre. Des prix cassés oui, mais des coûts humains et environnementaux révoltants. On parle de conditions de travail précaires, suivies d’un impact écologique catastrophique entre surproduction et (très) faible durabilité des produits. Comme une addiction, les consommateurs français ne parviennent pas à se détacher de ce cercle vicieux de la dépense.
Les géants de l’ultra fast-fashion échappent à la justice
Mettre un terme à cette consommation malsaine est un combat de longue haleine. Malgré de multiples accusations envers Shein et Temu, entre violation de propriété intellectuelle et pratiques commerciales déloyales, les deux géants de l’ultra fast-fashion semblent contourner toute véritable sanction. Si entre les deux sites règne une rivalité féroce, teintée de poursuites judiciaires incessantes, s’accusant mutuellement de plagiat (alors qu’ils sont tous deux rois de la contrefaçon) cette guerre ne fait qu’accentuer leur domination sur le marché.
Le système juridique international se trouve alors dépourvu de capacité à contrôler leurs pratiques. Sans régulation stricte, Shein et Temu prospèrent au-delà des controverses, au détriment de l’environnement et de l’humanité. De quoi se garantir un bon karma. Un constat des plus amer qui doit inciter les consommateurs à redoubler de responsabilité, mais aussi (et surtout) à l’échelle gouvernementale, qui peine à mettre en place des mesures pour radicalement recadrer ces monstres de l’ultra fast-fashion.
Cette consommation devenue tendance, qui semble bien loin de s’essouffler, soulève de nombreuses questions sur l’avenir de la consommation en France.
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