Comment le BDSM Core et Fetishwear ont-ils réussi à dominer nos mœurs ?
Longtemps, le style SM n'était qu'une chimère pensée par les créateurs pour une minorité de rebelles. Aujourd'hui, elle s'inscrit dans nos codes de la mode, et repousse d'ailleurs les limites de ses codes initiaux.
Écrit par Marie Ordioni le
Mode et sexe font la paire, et ça, ça ne date pas d’hier. Le fétichisme se glisse dans nos vêtements depuis des décennies. Il peut prendre la forme d’un cuir, d’un corset, parfois d’une cagoule. Aussi discret ou voyant soit-il, il exprime les mêmes désirs de séduction - et plus si affinité -. Fetishwear ou BDSM Core? Même combat. Celui de nos corps qui se libèrent et s’expriment. Celui d’un style qui brise les codes et tabous. Qui va au-delà des limites du "socialement correct".
Grande tendance des années 70 popularisée par Vivienne Westwood, l’univers SM n’a, depuis, cessé d’être visité et revisité. En 2021, les créateurs profitaient de la fin du confinement pour signer son énième retour. Nous donner envie de troquer notre jogging avec un pantalon en latex… Pas très cornélien - ni catholique, d'ailleurs -, comme choix. Aujourd’hui, la sexualité est plus que jamais installée dans les mœurs de la mode.
Une histoire de corset
Si aujourd’hui, femmes et hommes sont ultra-sexualisés, cela n’a évidemment pas toujours été le cas… Au contraire. La mode a évolué dans une société très répressive et a toujours eu comme consigne première de couvrir, du mieux qu’elle le pouvait, notre corps. Quand on pense "fétichisme", on a pourtant envie de croire à une première apparition au siècle des Lumières avec le corset. Mais il aura fallu attendre encore des centainens d'années pour que ce mouvement gagne réellement du terrain, et se popularise.
En 1970, Vivienne Westwood rencontre Malcolm McLaren, manager des Sex Pistols. Coup de foudre artistique - et pas que -. Fusion de deux mondes, tous deux mettant l’univers punk à leur profit pour faire passer un message. Ensemble, ils mettent au monde la mythique boutique "SEX " au 430 Kings Road à Londres, fruit d’un amour entre la provocation et la rébellion. Par la suite, la créatrice en fait sa marque de fabrique. Jean-Paul Gaultier lui emboîte le pas.
Post-confinement : la libération du corps
Depuis, le BDSM Core n’a cessé de faire des apparitions plus ou moins furtives, évoluant avec son temps et son environnement. À la fin de l’année 2020, début 2021, les codes du fétichisme sont omniprésents sur les défilés des collections des prochaines saisons. Balenciaga et Mugler donnent le LA, les autres créateurs suivent. On porte des chaînes par-dessus des chemises pour aller au travail, des trenchs en vinyle pour aller faire nos courses et des cagoules et harnais pailletés en soirées. Enfermé pendant des mois, notre corps a, à cet instant précis, plus que jamais besoin de s’exprimer. Il a besoin de signaler qu’il est là, qu’il existe et surtout, qu’il fait ce dont il a envie.
Latex vortex
La période post-confinement a marqué une rupture avec le reste de l’histoire de la mode. Si avant, le Fetishwear n’était osé que par une minorité de personnes, il est aujourd’hui popularisé. Avant tout du côté des célébrités. Madonna, Kim Kardashian, Dua Lipa ou encore, Timothé Chalamet… La SM era trouve largement sa place chez les stars. Mais pas que, puisqu’elle n’est plus uniquement que luxe : elle se démocratise. Elle commence à dominer nos rues et nos garde-robes d’un fouet en cuir, et ne compte pas leur rendre leur liberté d’aussitôt… Puisqu’elle se revendique comme étant la liberté.
À condition d’en faire bon usage. Dans un entretien avec le magazine Vogue, Valérie Tasso, sexothérapeute, évoque le risque de l’hypersexualisation sur les réseaux sociaux : "Sur les réseaux sociaux, il y a une hyper transparence, une hyper visibilité au niveau de la sexualité, surtout des jeunes. On est passé d’une société très répressive à une société sursexualisée. On a l’impression que tout raconter et tout montrer nous rend très libre et libéré. Je crois que finalement, c’est un peu l’inverse." Laisser son corps s’exprimer ? Oui. Mais pour écouter ses envies… Pas celles des "Likes" des autres.
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