Comment MeToo a changé nos mentalités ? Un Avant/Après Me Too qui pose des questions

Écrit par Elena Gaudé le

Derrière le simple #metoo se cache un mouvement qui a explosé il y a 2 ans, quand les femmes victimes d'agressions sexuelles par Harvey Weinstein ont pris la parole à propos des horreurs qu'elles ont vécues. 

Après seulement 3 mois, ce sont 3 millions de femmes qui ont tweeté à propos de ce hashtag. Des célébrités ont parlé, mais aussi des femmes lambdas, plus personne ne s'est tu.

Ce mouvement est peu à peu devenu le mouvement féministe du XXIè siècle, ayant pour but de dénoncer les violences sexuelles faites aux femmes, de la remarque sexiste jusqu'au viol. Le but est d'engager une remise en question de la société patriarcale, ainsi qu'une prévention.

Deux ans après l'explosion de ce mouvement et de nouveaux hashtags qui ont résonné dans le monde entier (#balancetonporc en France), on en vient à se demander si on a vu des changements dans notre société. Comment la mentalité des gens a-t-elle changé depuis ce mouvement ?

Comment un hashtag a-t-il pu révolutionner la façon de penser de certaines personnes ? Nous allons répondre à ces questions en comparant la situation des femmes avant le mouvement à celle de maintenant, tout en expliquant ce que l'on aimerait faire pour continuer à faire bouger les choses.

Les Éclaireuses

Photo prise par Fabien Cottereau 

AVANT LE MOUVEMENT 

Sur les réseaux sociaux, des femmes ont raconté ce qui leur était arrivé et qu'elles ont dû affronter cette situation seule.

@Lonarr "J'avais 12 ans, quand j'ai raconté ce qu'il m'était arrivé, j'ai été pointée du doigt, humiliée et forcée à croire que c'était de ma faute. Je suis devenue suicidaire pendant toute mon adolescence et dépressive pour le reste de ma vie. La peine ne s'en va pas ; pas après un jour, pas après 26 ans". 

Mathilde Aimée "C'est ce garçon qui vient te rejoindre quand, à ta première soirée étudiante, tu t’es retrouvée trop mal parce que tu as trop bu et tu es allée t’allonger dans le noir dans la pièce à côté, et qui te viole, et qui, quand malgré ta tétanie, tu ne peux pas empêcher tes larmes de couler te reproche de lui avoir fait perdre son érection et de ne pas pouvoir finir tranquillement"

Plus récemment, c'est dans son podcast "Sorry Not Sorry" que l'actrice Alyssa Milano confie une seconde agression qu'elle a connue quand elle n'était qu'une jeune actrice. "C’était une scène de sexe avec un homme âgé de dix-sept ans de plus que moi. Tous les hommes sont plus vieux que les femmes dans ce genre de scène. Mais les professionnels savent gérer ce genre de situation de manière appropriée, sans dépasser les limites ni briser le consentement, et avec un degré de confiance qui est aussi très important. Les prédateurs en sont incapables. Cet homme n’était pas un professionnel.

Il a profité d’un instant de vulnérabilité totale, d’exposition au sens littéral, pour mettre ses mains sous mes sous-vêtements et tenter de me pénétrer avec ses doigts. Il m’a violée sur le tournage pendant que les caméras tournaient. J’étais dans un état de tourmente émotionnelle totale. Je me sentais prise au piège, complètement seule, et sans le moindre soutien de la part des dirigeants de cette production. En fin de compte, je me suis sentie contrainte de retourner sur le plateau, et pendant les 6 heures qui ont suivi, à continuer de tourner la scène avec l’homme qui m’avait agressée sexuellement."

Avant le mouvement, c'était un silence pesant. Chacune vivait des agressions sexuelles dans le métro, ou par quelqu'un de son entourage, ou en soirée, ou juste en traversant la rue... Tout se passait en silence. Et quand une femme osait prendre la parole, soit sa version était remise en question "tu étais habillée comment ?", "t'es sûre que tu ne le voulais pas ?", ou encore "elle exagère".

Les hommes n'avaient aucune idée du taux de gravité de la situation, et du nombre de femmes atteintes. Pourtant les chiffres ci-dessous prouvent le danger présent. 

Et comme à chaque fois, c'était toujours la victime qui était remise en question et non l'agresseur. Ce qui fait que leur combat était vain, surtout avec la justice qui n'était pas de leur côté. Arte a fait un reportage sur les victimes de viols, et on apprend que 3/4 des plaintes ne passent pas devant le tribunal. 

Le pire, c'est quand on sait que les femmes ont toujours été sexualisées et objectifiées par la société, que ce soit dans des publicités des années 50, où une femme était comparée à une voiture, ou encore maintenant, où le slut-shaming est à son apogée et où l'on insulte facilement à cause d'une simple tenue portée par une femme. Petit rappel, le slut-shaming consiste à stigmatiser, culpabiliser ou disqualifier toute femme dont l'attitude ou l'aspect physique serait jugé provocant ou trop ouvertement sexuel.

Avant #metoo, c'était une solitude qui rendait malade. C'était des victimes qui ne se sentaient pas légitimes à porter plainte, qui ne se sentaient pas écoutées et qui ne se sentaient pas soutenues. 

MAINTENANT ET DEMAIN

Illustration de Eleni Kalorkoti 

Deux ans après le mouvement, il est temps de dresser un bilan.

Concrètement, qu'est-ce qui a changé ? La libération de la parole des femmes a fait de grosses avancées, même s’il reste beaucoup de chemin à parcourir. On ressent une sororité plus présente que jamais, qui s'entraide, qui parle et qui, ensemble, se pousse vers le haut.

Les femmes soulèvent les problèmes sur le climat, demandent un salaire égal à celui des hommes, se battent contre la charge mentale, contre le sexisme, elles parlent d'acceptation de soi et de toutes. Leur parole a été libérée, et tout est remis en question, comme la place de la femme au coeur de la société. On ne se tait plus. 

Ensemble, nous n'avons plus peur. Quand c'est un ami qui, en plein repas, fait une blague sexiste, on lui dit d'arrêter. On éduque autour de nous pour que les gens le fassent à leur tour. Quand c'est une main baladeuse dans le métro, on ne se laisse plus faire. 

Pour parler chiffres, une étude a évalué une hausse de près de 13% des affaires de viols, d'agressions sexuelles et de harcèlement sexuel selon le ministère. 

LA QUESTION QUE POSE CE MOUVEMENT : QU'EST-CE QU'ON FAIT MAINTENANT ?

On continue à s'informer, car les agressions persistent, même si on n'en parle pas publiquement. On continue d'écouter les témoignages sur les réseaux sociaux, et on continue de prendre le parti de la victime, de ne pas la remettre en question, peu importe son passé ou qui elle est. 

De plus en plus de monde en parle, dans des podcasts, séries ou films, comme "Bombshell" qui tourne autour du scandale de la Fox il y a quelques années et qui sera sur grand écran le 20 décembre. On écoute le podcast "Sorry Not Sorry : Me too" d'Alyssa Milano,  on regarde la mini-série "Unbelievable", inspirée de faits réels. On s'intéresse à la campagne "Maintenant, on agit" en regardant la vidéo ci-dessous et on fait des dons. On ÉCOUTE. On AGIT. Parce qu'on a toutes subi une blague sexiste, un attouchement déplacé, du harcèlement de rue. Ou pire. 

Parce qu'il est temps d'enterrer le sexisme. Parce qu'il est temps que l'État protège les femmes.

On continuera à se battre.

 

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