Chanel va interdire l’upcycling de ses pièces

Ces dernières années, de nombreuses marques d’upcycling se sont développées, proposant des créations uniques réalisées à partir de pièces vintage soigneusement chinées. Une véritable valeur ajoutée, surtout lorsque les pièces d’origines appartiennent à une célèbre maison de luxe. Désormais, cette méthode de fabrication n’est plus tolérée…

Écrit par Téa Antonietti le

Pourquoi fantasmer sur une pièce de joaillerie Chanel à 9000€ quand on peut porter un collier au double C pour 60 fois moins cher ? Telle est la séduisante proposition de petites marques comme Gigi Paris et Kamad qui consistent à chiner des boutons de tailleur Chanel vintage où sont gravés le fameux logo pour ensuite les monter sur une chaîne. Des pendentifs résolument attractifs qui attachent indirectement les clientes conquises à l’aura luxueuse de la maison d’origine. 

Aux cous des créatrices de contenu que sont Natoo, Lena Situations ou encore Noholita qui en on fait la promotion sur leurs réseaux sociaux, ces bijoux upcyclés font ravage et s’offrent même un corner aux Galeries Lafayette pour Gigi Paris. Face à cette désacralisation de la maison de luxe, Chanel ne tolère pas l’usage de ses boutons estampillés du logo au double C, lorsqu’il participe à un détournement de l’image de la marque. Est-ce alors légal de s’appuyer sur la renommée d’une griffe de luxe pour commercialiser des pièces upcyclées ? Zoom sur une pratique écoresponsable qui semble dangereuse pour l'environnement des marques. 

Contrefaçon, propriété intellectuelle : Chanel réagit

Crédits : Vogue

Face à ce marché émergent où les pièces vintages et upcyclées connaissent une popularité croissante, le risque de contrefaçon menace l'intégrité Chanel et autres maisons de luxe. En réaction à cette menace, Chanel déploie des mesures rigoureuses pour protéger sa propriété intellectuelle et son image de marque. La maison s’est prononcée sur le sujet : “Nous sommes toujours extrêmement attentifs à l'équilibre entre la protection de nos droits de marque et les droits des autres à créer et commercer librement. Mais nous considérons que parfois, l'usage d'éléments estampillés du logo Chanel ne consiste qu'en un détournement non autorisé de nos marques, pour commercialiser des accessoires en s'appuyant simplement sur la renommée de Chanel. Dans ce cas précis, nous prenons les mesures que nous jugeons appropriées.”

Un risque de faux boutons

Il arrive que des fournisseurs de ces pièces vintages aux logos se fassent duper quant à l’authenticité du produit. Et pour cause d’un prix d’un bijou upcyclé ne dépassant pas en moyenne la barre des 150 euros, une vérification quant à l’origine du bouton acheté est dans la plupart des cas trop coûteuse. 

Même s'il existe des spécialistes, un faux bouton peut être dur à identifier et les marques doivent rester vigilantes face à des présumés experts, sachant qu’en France, aucun diplôme spécifique ne mène à ces spécialisations. 

Une jouissance déloyale de l’image de marque 

Il est prévisible que les maisons de luxe se méfient du marché de la seconde main et de l’upcycling, de peur que des marques ne nuisent à leur image et pourquoi pas même, à encourager la contrefaçon. Parfois, il arrive que certains bijoux soient vendus sans indiquer la marque d’origine d’où provient le logo de la pièce upcyclée. 

Dans le cadre d’une étude, Slate a interrogé l’avocate spécialisée dans la propriété intellectuelle Coraline Favrel qui s’est exprimée sur la situation des griffes de luxe face à ces créations : “Qu'importe que le bouton soit authentique ou non, c'est de la contrefaçon.” “À partir du moment où vous reproduisez la marque de quelqu'un d'autre pour le même produit, ici pour des bijoux, vous êtes contrefacteur. Les sanctions peuvent aller jusqu'à trois ans d'emprisonnement.”

Chanel fait face à la même problématique de l’autre côté du pacifique 

Dans une étude de cas récemment dévoilée, le média Business of Fashion (BOF) a mis le doigt sur la problématique d’un upcycling risqué pour la maison de luxe. Le tout illustré par le cas de Travis Kelce, le joueur de football américain et golden retriever boyfriend de Taylor Swift, qui portait il y a quelque temps une chemise flamboyante ornée du logo géant Chanel. Une création recyclée à partir d'écharpes Chanel vintage par la marque J. Logan Home, qui n’a pas manqué d’atterrir dans le viseur du département juridique de Chanel. En février, une lettre de cessation et un ordre de s'abstenir ont été adressés à la marque, exigeant l'arrêt de la vente de produits portant leur logo. 

Une tension émergente entre les jeunes créateurs aux ambitions d’upcycling innovantes et écoresponsables face aux géants du luxe qui le perçoivent comme une emprise sur l’image et la distribution de leur identité de marque. 

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