Les soirées d’intégration : haut lieu d’agression

Nouvelle année, mêmes dérives. Selon la dernière étude de l’Observatoire étudiant des violences sexuelles et sexistes, les soirées d’intégration restent le théâtre d’actes de violences préoccupantes. Malgré les efforts de sensibilisation, le phénomène persiste. On fait le point.

Écrit par Camille Croizé le

Les soirées d’intégration, censées symboliser l’entrée dans la vie étudiante, continuent de masquer une réalité bien plus sombre. D'après l'enquête menée par l'Observatoire étudiant des violences sexuelles et sexistes, un étudiant sur trois déclare avoir été témoin ou victime d'actes de violences lors de ces événements festifs. Des comportements qui s'aggravent avec l'alcool, le manque de supervision et les dynamiques de groupe malsaines. 

En 2023, alors que la parole commence à se libérer et que des initiatives fleurissent pour mieux protéger les étudiant.e.s, ces violences semblent toujours être un passage obligé de la rentrée universitaire. Le plus alarmant ? Ces chiffres ne baissent pas,et l’impunité règne encore trop souvent. Pourquoi, malgré les avertissements, les soirées d’intégration sont-elles toujours le terrain de jeux des pires abus ?

"59% des viols commis en milieu étudiant le sont au cours d'un événement festif"

L’étude de l’Observatoire VSS révèle un chiffre glaçant : 37,1 % des étudiant.e.s interrogés ont été victimes ou témoins de violences sexuelles ou sexistes lors de soirées d'intégration. Et pour les femmes et les personnes non-binaires, ce chiffre grimpe à 61,8 %. On parle ici d’attouchements non consentis, d’exhibitionnisme, de harcèlement sexuel et, bien sûr, de bizutage. Loin d’être un simple excès de « tradition », ces actes sont souvent dissimulés sous des faux-semblants festifs, où l’alcool et la pression de groupe font exploser toutes les limites.

Les soirées d’intégration, censées être des moments de rencontre et de cohésion, se transforment pour beaucoup en cauchemar.Cette statistique, issue de l’Observatoire étudiant des VSS, est probablement l’une des plus choquantes : 59% des viols en milieu étudiant surviennent lors d’un événement festif. Sous couvert de jeux ou de défis « entre potes », certains étudiants en profitent pour imposer des comportements qui ne devraient jamais être tolérés. Autant vous dire que dans ce contexte l’idée du consentement disparaît complètement.

À cela s’ajoute la peur de dénoncer, d’être jugé ou de ne pas être cru qui empêche trop souvent les victimes de s'exprimer. Il suffit de voir le (trop) faible taux de signalement des victimes pour comprendre pourquoi ces violences continuent de se reproduire année après année. Seuls 5% des victimes ou témoins osent parler. Silence radio pour les autres, souvent par peur des représailles ou par honte. Résultat ? Ces violences restent banalisées, presque invisibles, jusqu'à ce que l'on regarde de plus près les statistiques alarmantes.

Quelles sont les principales causes de ces violences ?

Pourquoi ces violences sont-elles aussi présentes dans le milieu étudiant, et en particulier lors des soirées d’intégration ? D’après l’enquête, plusieurs facteurs se dégagent. 

Une consommation inquiétante d’alcool  

En tête de liste : l’alcool. Pas de surprise ici, la consommation excessive d’alcool est identifiée comme le principal catalyseur des violences, étant pointée du doigt par 49,5% des étudiants. 

On connaît le scénario : alcool à volonté, jeux d'alcool forcés et perte totale des repères. Le respect des limites s'efface, et l’agression devient une issue beaucoup trop fréquente.

Le statut « d’ancien » mis en avant 

Autre facteur clé : la hiérarchie entre les promotions. Les bizutages, bien que théoriquement interdits, continuent d’être monnaie courante. Ces pratiques, sous prétexte d’intégration, placent les nouvelles recrues dans des situations humiliantes ou dangereuses, renforçant un climat de domination. 

Ici, il n’est pas rare de voir la première semaine de cours marquée par des comportements abusifs, où la hiérarchie se manifeste par des rites dégradants, et où les plus jeunes sont vulnérables face aux excès des plus anciens.

Un manque d’implication des établissements ? 

Enfin, l’enquête révèle un manque flagrant de prévention et d'encadrement. Depuis 2020, des cellules de veille et d'écoute ont été mises en place dans les établissements. Pourtant, 30,2% des étudiant.e.s estiment que les actions de sensibilisation ne sont pas efficaces, ce qui montre une fracture entre les discours officiels et la réalité sur le terrain. 

Trop souvent, ces initiatives ne parviennent pas à toucher leur cible, et les étudiants se sentent livrés à eux-mêmes. Ce qui ressort de l'étude, c'est surtout une impression d'abandon. Désemparées, les victimes se retrouvent isolées, les témoins ne savent pas comment réagir et les agressions se répètent dans un silence pesant.

Les violences sexuelles et sexistes lors des soirées d’intégration ne sont pas qu’une dérive isolée. Elles révèlent un problème systémique dans le milieu étudiant, où la fête et la camaraderie sont trop souvent des prétextes pour justifier l’injustifiable. 

Pour que ces violences cessent, il est impératif de remettre en question la culture festive étudiante, de renforcer les mesures de prévention, et surtout, de faire entendre les voix de celles et ceux qui en sont victimes.

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Camille Croizé

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