Réchauffement climatique : L’humanité menacée ‘d’impacts irréversibles’

Les impacts du changement climatique sont déjà dévastateurs, alerte le dernier rapport des experts climat de l’ONU, et "le pire est à venir". La vie sur Terre telle que nous la connaissons pourrait être inévitablement transformée par le dérèglement climatique d'ici 2050.

Écrit par Elodie Josserand le

Manque d'eau et malnutrition ? Migration des populations et disparition de certains groupes ? Pire, extinction d'espèces et changement radical de l'humanité ? C'est ce qui nous attend d'ici moins de 30 ans. Des experts climat de l'ONU en sont certains, la vie sur Terre telle que nous la connaissons sera inéluctablement transformée par le dérèglement climatique. Dans leur projet de rapport obtenu par l'AFP, les scientifiques alertent sur la situation climatique. Quel que soit le rythme de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les impacts dévastateurs du réchauffement sur la nature et l'humanité qui en dépend vont s'accélérer, assure le Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), et devenir douloureusement palpables bien avant 2050. 

"Le pire est à venir"

Parmi les conclusions du rapport figure un abaissement du seuil au-delà duquel le réchauffement peut être considéré comme acceptable. En signant l'accord de Paris en 2015, le monde s'est engagé à limiter le réchauffement à +2°C par rapport à l'ère préindustrielle, et si possible +1,5°C. Désormais, le Giec estime que dépasser +1,5°C pourrait déjà entraîner "des conséquences graves, pendant des siècles, et parfois irréversibles". Selon l'Organisation météorologique mondiale, la probabilité que ce seuil de +1,5°C sur une année soit dépassé dès 2025 est déjà de 40%. "Le pire est à venir, avec des implications sur la vie de nos enfants et nos petits-enfants bien plus que sur la nôtre", alerte le groupe d'experts.

Ce n'est pas une surprise, le climat a déjà changé. Alors que la hausse des températures moyennes depuis le milieu du XIXe siècle atteint 1,1°C, les effets sont déjà graves. Pour certains animaux et variétés de plantes, il est peut-être déjà trop tard. Certains organismes n'auront pas la capacité de s'adapter aux nouvelles conditions de vie, souligne le rapport, citant les récifs coralliens dont un demi-milliard de personnes dépendent. Parmi les espèces menacées figurent les animaux de l'Arctique, territoire qui se réchauffe trois fois plus vite que la moyenne. Sur place, des modes de vie ancestraux, de peuples vivant en lien étroit avec la glace pourraient aussi disparaître.

"La vie sur Terre peut se remettre d'un changement climatique (...) L'humanité ne le peut pas"

Agriculture, élevage, pêche, aquaculture... "Dans tous les systèmes de production alimentaire, les pertes soudaines s'accroissent", observe le rapport, pointant le changement climatique comme principal responsable. Or, "les niveaux actuels d'adaptation seront insuffisants pour répondre aux futurs risques climatiques", prévient le Giec. Même en limitant la hausse à 2°C, jusqu'à 80 millions de personnes supplémentaires seront en manque de nourriture d'ici 2050 et 130 millions pourraient tomber dans la pauvreté extrême d'ici dix ans.

En 2050, des centaines de millions d'habitants de villes côtières seront menacés par des vagues-submersions plus fréquentes, provoquées par hausse du niveau de la mer, qui entraînera à son tour des migrations importantes. C'est ce que le Giec appelle "les effets cascades". À +1,5°C, dans les villes, 350 millions d'habitants supplémentaires seront exposés aux pénuries d'eau, 400 millions à + 2°C. "La vie sur Terre peut se remettre d'un changement climatique majeur en évoluant vers de nouvelles espèces et en créant de nouveaux écosystèmes", note le résumé technique de 137 pages. "L'humanité ne le peut pas".

La solution, des mesures immédiates et drastiques

Le groupe d'experts oscille entre un ton apocalyptique et l'espoir offert aux Hommes de changer leur destin par des mesures immédiates et drastiques. Le rapport d'évaluation complet de 4.000 pages, bien plus alarmiste que le précédent de 2014, a pour vocation d'éclairer les décisions politiques. Même si ses principales conclusions ne changeront pas, il ne sera officiellement publié qu'en février 2022, après son approbation par consensus par les 195 États membres. Trop tard cependant pour les cruciales réunions internationales sur le climat et la biodiversité prévues fin 2021, notent certains scientifiques.

En dépit de ses conclusions alarmantes, le rapport offre ainsi une note d'espoir. L'humanité peut encore orienter sa destinée vers un avenir meilleur en prenant aujourd'hui des mesures fortes. "Nous avons besoin d'une transformation radicale des processus et des comportements à tous les niveaux : individus, communautés, entreprises, institutions et gouvernement", plaide le rapport. "Nous devons redéfinir notre mode de vie et de consommation".

Les Éclaireuses