Le single shaming : et si on arrêtait de demander aux célibataires pourquoi ils sont seuls ?

Single Shaming : forme de discrimination, verbale ou non, à l'encontre des personnes célibataires, considérées comme anormales, car seules. Maintenant qu'on sait ce que ça veut dire, si on lâchait les baskets des célibs ?

Écrit par Juliette Gour le

"C'est bizarre, jolie comme tu es, c'est pas normal que tu sois encore seule" ; "Non mais tu es trop exigeant.e, c'est pour ça que tu ne trouves pas, sois moins regardant.e" ; "Tu as pas envie d'un peu de stabilité dans ta vie ?" 

Ceci n'est qu'un (très) succin florilège de ce que les célibataires, qu'ils soient hommes ou femmes, peuvent entendre au quotidien. Si aucun genre n'est épargné par le phénomène du single shaming, patriarcat oblige, les femmes en souffrent plus, parce que, c'est bien connu, il n'y a rien de normal à ce qu'une femme ne cherche pas désespérément le prince charmant (Disney nous a pourtant bien biberonnées, non ?).

Selon le site de rencontre Match, 52% des gens ont déjà subi du single shaming de la part de leurs amis, de leur famille, mais aussi d'inconnus, qui ne conçoivent pas qu'une femme puisse acheter un appartement seule (par exemple). Les réactions des pairs sont variées, 38% des shamers vont avoir pitié de ces pauvres célibataires, comme si c'était une punition divine que de faire cavalier seul. Pourtant, il semblerait que ça ne chagrine que les gens en couple de voir des personnes sans compagnon. Globalement, 59% des célibataires, hommes et femmes confondus, s'estiment satisfaits de leur statut actuel.

Mais alors, pourquoi on en veut tellement aux célibataires de marcher seuls (dans les rues qui se donnent) ? Et surtout, pourquoi on se soucie tellement de leur vie sentimentale ? 

Enjoy,

Les Éclaireuses

1) Le single shaming, qu'est-ce que ça englobe réellement ?

Globalement, le single shaming s'articule autour d'une multitude de comportements : des paroles, des gestes, des réactions... Finalement, cela va d'une simple remarque à votre copine éternelle célibataire aux dates surprises organisés pour espérer caser deux personnes ensemble. C'est aussi mettre les célibataires de côté, en ne faisant que des soirées et des week-ends couple (encore que, il faudrait être sûr que les amis célibataires veuillent prendre part à ce genre d'évènements).

Mais alors, pourquoi nous avons ce genre de comportement avec les personnes qui ne sont pas en couple ? Parce que, dans l'inconscient collectif, il faut être deux (ou plus dans le cas des trouples) pour être heureux. Pendant longtemps, notamment à cause de l'influence de la religion sur l'éducation, il n'était pas concevable qu'un homme et encore moins une femme puissent être célibataires par choix. On a intégré le fait que si quelqu'un est seul depuis longtemps, c'est qu'il y a forcément quelque chose qui cloche. 

De ces comportements intégrés sont nés le single shaming, mais aussi la pression maritale qui fait pression sur les jeunes gens (et surtout aux femmes, encore et toujours) en les invitant à se mettre en couple rapidement, pour se marier rapidement, pour faire des enfants rapides et ainsi renouveler le cycle sans fin.

2) Pourquoi les personnes en couple se permettent de faire des remarques aux célibataires ?

Parfois, les personnes en couple donnent l'impression que le célibataire de la bande est à la personne à abattre et qu'il faut absolument le faire passer dans le groupe des "amoureux et heureux" pour les sauver d'une vie morose et/ou dépravée. S'il est évident que ce type de comportement est lié à l'intégration de comportements normés liés à la société : se marier, être amoureux, fonder une famille... Le single shaming peut être lié à de nombreux autres facteurs.

L'envie, de la part de vos amis en couple qui souhaitent que vous connaissiez le même bonheur qu'eux. Si ce réflexe est tout à fait louable, il n'en reste pas moins intrusif dans la vie de la personne célibataire qui, on le rappelle, peut être célibataire par choix. L'autre motivation peut aussi être la jalousie. Si cet aspect est plus sombre, il ne faut pas pour autant l'ignorer. Il sera malhonnête de nier qu'il est possible que les personnes en couple envient secrètement la situation des célibataires. Ainsi, pour ne plus les envier, les rallier à leur cause est une solution qui peut tenir la route. 

Mais, comme pour toutes les formes de shaming, elle peut avoir une résonance plus ou moins négative chez les personnes qui subissent le single shaming. Gardez à l'esprit que si, pour vous, c'est la première fois que vous faites une remarque sur la vie amoureuse de quelqu'un, ce n'est peut-être pas le cas de cette personne qui entend sûrement 5 remarques par jour ou par semaine sur sa vie sentimentale.

Souvent, il vaut mieux garder son avis pour soi, vous éviterez ainsi de blesser les gens, même si, de votre côté, cela part d'un bon sentiment.

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3) Comment répondre aux single shamers ?

Même si, dans l'absolu, personne ne vous demande de vous justifier sur votre célibat, il y a des jours où on ne peut pas s'empêcher de vouloir répondre à ses micro-attaques du quotidien. Ne sautez pas immédiatement à la gorge de la personne en face de vous, elle n'a peut-être tout simplement pas conscience que sa/ses remarques peuvent être désobligeantes.

Deux chemins se présentent à vous. Vous pouvez répondre avec banalité, en utilisant une phrase toute faite comme "en ce moment, j'ai surtout besoin de me recentrer sur moi" ou "je pense que je n'ai tout simplement pas rencontré la bonne personne". Ou, vous pouvez vous lancer dans un débat animé sur l'influence que la société peut avoir sur notre conception normée de la vie, en faisant comprendre à votre interlocuteur à quel point il est étriqué de penser que l'on ne peut pas être célibataire par choix (mais attention, vous risquez d'être blacklisté des soirées de vos amis en couple... Quoi que. C'est peut-être pas une si grosse punition).

Sachez qu'en France, près de 8 millions de personnes sont célibataires. Depuis 1969, le pourcentage de célibataires dans la population est passé de 6% à 12% (INSEE). Finalement, c'est in d'être célib' ? Il semblerait qu'en France, les célibataires ne soient pas inquiétés de leur situation. L'âge de bascule reste cependant relativement jeune, c'est vers 30 ans que les Françaises et les Français amorceraient le passage à la vie de couple. 

Est-ce qu'il n'est pas mieux de laisser faire le temps et de profiter de la vie, seul.e, à plusieurs, avec un partenaire d'une nuit ou pour la vie ? Une seule règle d'or demeure : arrêter de juger et de donner son avis sur la vie de ses tiers, promis, tout le monde s'en portera mieux.

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