“Ce qui compte c’est qu’il y ait une conséquence”, Sara Forestier témoigne des violences subies dans sa carrière

Dimanche 10 novembre, l'Assemblée Nationale a réouvert le lourd dossier des violences dans le milieu du cinéma. Lors d'une vaste audition, l'actrice Sara Forestier a témoigné de la réalité du métier - non sans émotions - et appelle à une réaction de la part de l'État.

Écrit par Camille Cortot le

Dans un monde où les projecteurs brillent et les rêves se concrétisent, l’industrie du cinéma porte aussi une part d’ombre. Depuis la déferlante du mouvement #MeToo,les voix s’élèvent pour dénoncer les violences sexuelles, souvent enfouies sous des années de silence. Pourtant, malgré les scandales, les dénonciations et les témoignages poignants, des figures influentes dans le cinéma continuent d’échapper aux conséquences. En France, cette vague de contestation a pris un tournant symbolique avec Adèle Haenel, qui avait quitté la cérémonie des César en 2020 pour protester contre le sacre de Roman Polanski, réalisateur plusieurs fois accusé d’agression sexuelle.

Plus récemment, Sara Forestier, une actrice respectée et engagée, a relancé le débat en dénonçant publiquement des violences présumées dans le milieu du cinéma. Elle n’a pas hésité à prendre position, multipliant les interventions et les témoignages pour appeler à un véritable changement dans les institutions cinématographiques. Sa démarche souligne que le problème des violences sexuelles dans le monde du cinéma ne se limite pas à quelques incidents isolés. Elle demande une révision en profondeur des structures, des réglementations, et un renforcement de la protection des victimes.

L’Assemblée nationale entre en scène : vers des réformes concrètes ? 

Face à des violences sexuelles qui ne cessent de sévir, l’Assemblée nationale a pris la décision de réexaminer la situation. Le 10 octobre 2024, les députés ont rouvert les commissions d’enquête sur les violences sexuelles dans le milieu culturel, visant spécifiquement le monde du cinéma. Cette initiative, réclamée depuis longtemps par les victimes et leurs alliés, veut instaurer un cadre de protection renforcé, adapté aux spécificités du secteur culturel et artistique. L’objectif est d’éviter que les prédateurs bénéficient d’une impunité de facto, protégés par leur notoriété ou leurs réseaux d’influence. Cette action politique marque une nouvelle phase dans l’évolution du mouvement #MeToo en France. Les voix des victimes ne sont plus simplement écoutées ; elles deviennent le levier d’un changement légal et institutionnel.

Les parlementaires se sont engagés à évaluer les dispositifs existants, à mettre en lumière les lacunes et à proposer des ajustements pour garantir un environnement de travail sécurisé. Le débat n’est plus seulement symbolique. Il s’agit désormais de créer des changements réels, avec des lois qui protègent les victimes, empêchent les récidives, et brisent le silence qui étouffe encore de nombreux témoignages.

Sara Forestier : un témoignage poignant pour réveiller les consciences

C’est dans ce contexte que l’actrice Sara Forestier a fait une intervention remarquée à l’Assemblée nationale. Son discours, chargé d’émotion, a rappelé les violences qu’elle-même a subies et les effets dévastateurs du silence imposé. Elle a notamment accusé Nicolas Duvauchelle de l’avoir giflée, révélant des années de violences et d’intimidations qui, comme pour tant d’autres, n’ont jamais été sanctionnées. Dans une interview pour Quotidien, l'actrice a raconté comment elle a dû se reconstruire, laissant derrière elle une carrière prometteuse pendant quelques années, pour se protéger et se libérer de cet environnement toxique. Son témoignage soulève des questions importantes sur les mécanismes de protection des agresseurs dans l’industrie culturelle.

“On en parle très peu pour les femmes, du traumatisme” déclare-t-elle, exprimant le sentiment d’injustice partagé par de nombreuses victimes, encore contraintes de se taire pour préserver leur carrière. Son intervention publique vient briser un tabou et rappelle que même les plus jeunes, parfois mineures, ne sont pas épargnées. Sara Forestier s’est ainsi transformée en porte-parole d’une génération d’actrices traumatisées, prêtes à exposer l’envers du décor pour que de véritables changements soient mis en place. 

Des témoignages pour une révolution 

Les interventions de figures comme Judith Godrèche et Sara Forestier sont très importantes pour créer une nouvelle génération bienveillante au cinéma. Elles s’inscrivent dans un mouvement profond pour transformer le milieu artistique, en France et au-delà. Leurs récits rappellent la vulnérabilité des artistes face aux abus de pouvoir dans des environnements où l’image publique prime souvent sur l’éthique. Les récits courageux de Judith Godrèche, de Sara Forestier et bien d’autres, ont mis en lumière une réalité dure à accepter mais impossible à ignorer : celle d’une industrie où la violence est souvent tue, où la carrière des agresseurs reste intacte tandis que les victimes sont réduites au silence. Mais il semble qu’un point de non-retour a été atteint.

Les discussions à l’Assemblée nationale et la volonté croissante des institutions d’intervenir témoignent d’un changement de cap. Des figures influentes du cinéma prennent enfin la parole, avec une détermination sans faille pour réclamer justice et transformer en profondeur un système qui a trop longtemps privilégié l’impunité.

Un avenir incertain, mais porteur d’espoir

La route est encore longue pour garantir la sécurité des femmes et des jeunes artistes dans le milieu culturel. Mais les mots de ces femmes résonnent comme autant d’appels à l’action. Alors que le débat gagne en ampleur et que l’Assemblée nationale multiplie les initiatives, il devient de plus en plus clair que le changement est en marche, comme Sara Forestier l'a affirmé sur le plateau de Quotidien : “Je pense que vraiment il y a quelque chose qui est en train de changer".

Les voix des victimes ne sont plus isolées, et leur combat pour la justice laisse entrevoir un futur où les artistes, peu importe leur genre, pourront enfin s’épanouir sans crainte d’être broyés par un système complice des abus. Ce tournant historique pourrait bien transformer à jamais le cinéma.

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