Pourquoi l’extrême droite représente une menace pour les droits des femmes ?

Partout en Europe, c'est le même constat : les partis d'extrême droite gagnent du terrain et c'est loin d'être une bonne nouvelle, surtout en ce qui concerne les droits des femmes.

Écrit par Juliette Gour le

Au lendemain des élections européennes laissant la part belle aux partis conservateurs, il paraît essentiel de prendre un peu de recul sur la situation pour voir ce qu'il se passe chez nos voisins européens. Les partis de l'extrême - droite surtout - semblent être plébiscités partout (ou presque). Malgré leur conservatisme séduisant, les partis de l'extrême droite ne sont pas bénéfiques pour tout le monde. Les exemples ne manquent et les droits remis en question sont majoritairement les droits des minorités opprimées : personnes LGBTQIA+, les femmes, les personnes racisées... 

Que ce soit en Pologne, en Italie ou en Autriche - trois pays où l'extrême droite est particulièrement puissante - la vie est loin d'être rose pour les femmes qui perdent de plus en plus de droits.

image herstory

C'est toujours l'avortement et la contraception qui trinquent en premier

Constat plutôt évident, la liberté des femmes à disposer de leur corps est souvent la première chose impactée par les gouvernements de l'extrême. Autriche, Italie et Pologne semblent être totalement accordées sur la question, car les 3 pays ont durci (ou supprimé) les conditions d'accès à l'avortement. En Italie, par exemple, le gouvernement de Giorgia Meloni essaye de retreindre l'accès à l'avortement dans le pays. Pour la Pologne, c'est encore plus radical, l'avortement y est presque interdit depuis octobre 2020 (même en cas de malformation). 

La question de la contraception est également beaucoup discutée par ces gouvernements (rien d'étonnant, elle va de pair avec le droit à l'avortement). Entre les restrictions pour accéder à la pilule du lendemain et l'absence quasi systématique de l'éducation sexuelle dans les pays les plus traditionalistes, les femmes en âge de procréer sont totalement livrées à elles-mêmes, sans éducation ni solution de repli en cas de grossesse involontaire.

Pourquoi cette obsession pour limiter les libertés liées au corps des femmes ? 

Si les gouvernements extrémistes s'acharnent à vouloir limiter les lois qui permettent aux femmes de disposer de leur corps, c'est pour plusieurs raisons. La première, c'est que c'est la forme de contrôle la plus évidente : contrôlez le corps des femmes et vous contrôlez 50% de la population d'un pays. L'autre argument est celui de "l'armement démographique", une théorie selon laquelle un pays n'est puissant que s'il fait des enfants, parce que ça sous-entend que la population est renouvelée et c'est un moyen de contrer l'immigration, autre cheval de bataille de l'extrême droite. 

Dans un cas comme dans l'autre, c'est une façon de renvoyer les femmes à leur condition de genre et seulement leur condition de genre : les femmes ne sont rien de plus que des outils politiques, qui permettent de renouveler la population et c'est pour cette raison qu'il est important d'y imposer un certain contrôle.

L'égalité des chances et des genres deviennent des fantasmes

Avec des gouvernements qui limitent l'accès à la contraception et à l'avortement, il ne faut pas s'attendre à ce que des efforts soient déployés pour instaurer égalité et parité entre les femmes et les hommes. En Italie, la politique et les discours autour de l'éducation favorisent de plus en plus les valeurs traditionnelles, poussant les femmes à limiter leurs ambitions. 

En Pologne, l'absence de considération des femmes n'impacte pas seulement la vie professionnelle. Les différentes réformes judiciaires de ces dernières années ont affaibli l'indépendance des tribunaux. Il est aujourd'hui très compliqué (pour ne pas dire impossible) pour une femme de faire valoir ses droits devant la justice, y compris en cas de discrimination, violence ou viol. 

QUID des violences faites aux femmes ? 

Il fallait s'y attendre, avec des gouvernements qui ne semblent pas être dans l'optique de protéger les femmes, la question des violences faites aux femmes est centrale dans les pays avec un gouvernement d'extrême droite. La Pologne par exemple, a tenté de se retirer de la convention d'Istanbul, un traité international qui lutte depuis 2011 contre les violences faites aux femmes.

En Italie, le succès du film "Il reste encore demain" met en lumière un problème sociétal autour des violences domestiques. En 2023, le pays a recensé 106 victimes de féminicides, dont la moitié tuée par leur partenaire ou ex-partenaire. En 2017, selon l'ONU, on décomptait 65 féminicides, soit une augmentation de 63% en moins de 10 ans. 

Si la France n'est pas en reste sur les questions de violences faites aux femmes, la question reste cependant débattue et les porte-parole de la lutte contre les violences faites aux femmes ont encore le droit de s'exprimer publiquement. Les gouvernements font généralement le choix du non-soutien, en limitant les subventions accordées aux associations de soutien aux victimes de violence. 

Le cas des USA

Dès qu'il est question des politiques conservatrices, on pense évidemment aux États-Unis et au gouvernement de Trump. S'il est évident que la liberté des femmes à disposer de leur corps a beaucoup souffert du passage de Trump au pouvoir, il est difficile de comparer la situation américaine à la situation européenne, car les fondements de l'idéologie ne sont pas les mêmes : si aux États-Unis, la motivation à limiter la liberté des femmes à disposer de leur corps est avant tout religieuse, en Europe, elle est surtout idéologique et politique

Le résultat reste cependant le même et confirme la maxime - prémonitoire - de Simone de Beauvoir : "N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant."

Retrouvez plus d'articles dans notre rubrique Société

Tags :

À lire aussi