La grande tendance de cette Fashion Week : tirer la tronche

À chaque Fashion Week, on retrouve la même scène : des mannequins au regard glacial, des lèvres figées, et aucun sourire à l'horizon. Mais pourquoi les tops models semblent-elles faire la tête ? Derrière cette expression neutre se cache une longue histoire de tendances et de codes du luxe. Spoiler alert : ce n’est pas qu’elles boudent !

Écrit par Camille Croizé le

La Fashion Week, c’est l’effervescence des tendances, les créateurs en plein show, et surtout, les mannequins qui défilent avec des expressions sérieuses, presque glaciales. Mais pourquoi ces visages inexpressifs et ces regards figés ? Pourquoi les top models ne se laissent-elles jamais aller à un sourire, alors qu’elles semblent incarner tout ce qu’il y a de plus glamour et enviable ? Derrière ce visage fermé, il y a une raison bien précise, ancrée dans les codes de la mode et de son histoire. Un sourire pourrait-il vraiment dévaloriser une robe haute couture ? Zoom sur cette drôle de règle qui fait du catwalk un véritable théâtre d’impassibilité.

Les premiers top models devaient s’exprimer et être agréables

Il fut un temps où les défilés étaient des spectacles vivants, où les mannequins souriaient, dansaient, et vivaient littéralement les vêtements qu’elles portaient. Dans les années 60 et 70, la personnalité des mannequins devait transparaître, créant ainsi une alchimie entre les tenues et celles qui les incarnaient. 

Ines de la Fressange illuminait les défilés avec son sourire radieux, et des icônes comme Cindy Crawford et Naomi Campbell ont marqué l’histoire de la mode avec leurs expressions éclatantes, devenant des stars à part entière. 

À l'époque, le mannequinat était autant une question d’attitude que de présentation des vêtements, et les défilés étaient presque des performances artistiques. Les tops avaient le pouvoir de faire rêver le public grâce à leur charisme. Alors, quand est-ce que tout ça a changé ?

Le sourire : un élément de langage qui déconcentre ?

Le tournant vient probablement des années 90, avec l’arrivée des marques minimalistes et d’une nouvelle esthétique plus froide. Le sourire, autrefois marque de charme, est devenu superflu. Pourquoi ? Parce qu'il détournerait l’attention du vrai sujet : les vêtements. 

Comme l'expliquent certains créateurs, lorsqu’un mannequin sourit, c’est son visage qu’on regarde, et non la tenue. D’où l’apparition des visages neutres, presque impassibles. Le mannequin devient un "portemanteau" vivant, son rôle étant uniquement de mettre en valeur la création, sans attirer l'attention sur elle-même. 

L’idée est simple : les vêtements sont les stars, et le sourire pourrait leur voler la vedette. Un sourire éclatant pourrait nuire à l’aura mystérieuse et sérieuse que certaines marques veulent projeter. Alors, sourire ? No, thanks.

Devenir une grande dame en un seul pas

Défiler sur un podium, ce n’est pas une simple promenade de santé. Il y a une vraie discipline derrière cet art. Les créateurs attendent de leurs mannequins qu’elles marchent avec assurance, qu’elles dégagent une aura de force et de pouvoir

Ce n’est pas pour rien que des phrases comme "dominez la scène" ou "marchez avec détermination" sont souvent murmurées en coulisses avant le show. Le sourire, quant à lui, est perçu comme un signe de faiblesse, une expression trop humaine, trop vulnérable. Pour symboliser la force de la femme moderne et indépendante, il faut un visage fermé, une attitude sérieuse. 

Chaque pas est calculé, chaque mouvement est une déclaration silencieuse de puissance et d'élégance. Le sourire serait presque un faux pas dans cet univers où tout est sous contrôle.

Une mise à distance typiquement élitiste

Cette neutralité faciale n'est pas qu'une tendance passagère. Elle puise ses racines dans l’histoire, où l’élite aristocratique se distinguait par son absence de sourire. À cette époque, un sourire était considéré comme trop accessible, trop populaire. Les portraits royaux montraient des visages figés, synonymes de maîtrise de soi et de pouvoir. Cette idée s’est perpétuée dans l’univers de la mode. 

En refusant de sourire, les mannequins incarnent cette froideur aristocratique qui les éloigne du public. Le but ? Créer une distance, donner à voir le luxe comme quelque chose d’inaccessible, réservé à une certaine élite. Dans ce contexte, un sourire serait presque trop banal, voire vulgaire, pour des vêtements de haute couture qui se veulent exclusifs.

Mais tous les créateurs ne partagent pas cet avis

Cependant, tous les créateurs ne sont pas d'accord avec cette vision ultra-sérieuse du défilé. Certains, comme Jean Paul Gaultier, ont toujours aimé casser les codes en envoyant leurs mannequins sourire, rire, voire interagir avec le public. Et devinez quoi ? Cela ne détourne pas du tout l’attention des vêtements, au contraire. Chez Gaultier, le sourire devient un accessoire qui sublime la tenue, donnant encore plus de vie à la création. 

En brisant les règles rigides du catwalk, ces créateurs montrent que le sourire peut être une force, un geste qui humanise la mode sans pour autant diminuer l’impact des vêtements. Un rappel que la mode est avant tout une forme d’expression et de plaisir, où l’on peut, parfois, sourire à pleine dent.

Alors, la prochaine fois que vous regardez un défilé, rappelez-vous que derrière ces visages fermés, il y a toute une histoire de codes, de tendances, et de perceptions du luxe. Mais qui sait, peut-être qu’un jour, les sourires feront à nouveau officiellement leur apparition sur les podiums…

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Fashion Week|mannequin|vêtements
Camille Croizé

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