Kim Sae-ron : une mort qui en dit long sur la violence du star-system coréen

Kim Sae-ron a été retrouvée morte à son domicile, et si la cause exacte reste floue, une chose est sûre : la pression du star-system sud-coréen continue de faire des ravages. Derrière les strass et paillettes de la K-culture, une réalité bien plus sombre se dessine. Pourquoi tant de jeunes idols succombent-ils sous le poids des attentes ?

Écrit par Juliette Gour le

Le 16 février dernier, le corps de l'actrice Kim Sae-ron a été retrouvé inanimé, à son domicile. Si la mort n'a pas été qualifiée de suicide - elle ne le sera en réalité jamais - les amoureux de la K-culture le savent : cette situation n'est pas inédite. Au pays du matin calme, tout n'est pas toujours rose, surtout pour les idols.

Entre la pression du milieu et les médias voraces, leur carrière peut s'arrêter du jour au lendemain. Pour Kim Sae-ron, le milieu lui avait complètement tourné le dos depuis 2022. La raison ? Elle avait conduit en état d'ébriété. Un affront pour les Coréens, très à cheval sur les règles. Du jour au lendemain, sa carrière - pourtant prometteuse - s'est arrêtée et c'est toute la toxicité du star-system coréen : être performant est un prérequis, mais la moindre erreur est impardonnable.

Des cas comme celui de Kim Sae-ron, il y en a plein. En 2023 par exemple, Moonbin du groupe Astro a lui aussi été retrouvé mort chez lui, sans aucune explication.

Évidemment dramatiques, ces disparitions d'idols ne sont que le reflet d'une société hypercompétitive, gangrenée par la détresse des jeunes générations.

Le culte de la perfection, au détriment de la santé mentale

Oui la Corée a le vent en poupe, mais ce que les fanatiques du pays ne disent pas, c'est qu'il n'y fait pas toujours bon vivre. Certes, les rues de Séoul sont agréables et les K-drama nous donnent l'impression que la vie y est plus douce... Mais la réalité est bien plus compliquée pour les Coréens. Le suicide n'est pas qu'une affaire de célébrités. En 2024, le pays enregistrait l'un des plus hauts taux de suicide parmi les pays de l'OCDE. En 2022, le pays avait comptabilisé près de 13000 suicides sur l'année et 21,4% des morts avaient entre 20 et 29 ans (Statista).

Ce n'est pas rare de voir des jeunes se suicider et la disparition de Kim Sae-ron n'est donc pas un cas isolé. Elle est juste plus médiatisée, parce qu'elle concerne une célébrité. En réalité, des suicides, il y en a tous les jours en Corée, particulièrement chez les jeunes (entre 10 et 30 ans).

De nombreux étudiants se suicident à cause de la pression des cours : il est essentiel d'avoir les meilleures notes possibles pour avoir la chance de travailler dans de bonnes entreprises. Des jeunes hommes se suicident pendant le service militaire - les témoignages d'hommes traumatisés par la disparition d'un de leurs camarades ne manquent pas... La mort plane sur le quotidien des Coréens et les actions gouvernementales restent inexistantes.

À qui la faute ?

Le grand jeu chez les politiques coréens, c'est de trouver un fautif à cette situation. En 2024 un membre du parti du président Yoon (encore au pouvoir à l'époque) accusait les femmes de l'augmentation des suicides masculins dans le pays.Selon le rapport, il serait aujourd'hui plus difficile pour les hommes de trouver un emploi ou une épouse et, par la force des choses, les hommes se suicideraient de stress.

Si ces déclarations nous semblent risibles vu de l'occident, elles sont l'illustration du mal qui touche les sociétés asiatiques (et plus spécifiquement la Corée du Sud) : ce sont des pays ne considèrent toujours pas l'importance de la santé mentale et ce déni commence à peser lourd sur la société : il y aurait un suicide toutes les 40 minutes dans le pays.

À ce jour, aucune politique concrète n'a été mise en place dans le pays pour lutter contre ce fléau. On retrouve heureusement des dispositifs anti-suicide sur les ponts de Séoul et des téléphones d'urgence, mais ces solutions ne traitent pas le problème à la source. Au vu des instabilités politiques du pays - qui n'a toujours pas de gouvernement stable depuis la tentative de coup d'État de Yoon Suk-yeol, la situation n'est pas près de s'arranger.

Quid de l'industrie du divertissement ?

Pour ce qui est de l'industrie du divertissement, il y a heureusement quelques légers changements. En 2023, suite à une enquête du média Dispatch sur la carrière de Lee Seung-gi, le gouvernement a mis en place de nouvelles mesures pour protéger les jeunes recrues de l'industrie (et éviter leur exploitation).

Le nombre d'heures de travail a été réduit pour les stars de Kpop mineures (les moins de 12 ans ne peuvent pas travailler plus de 25 heures par semaine). Il y a également une obligation légale d'assurer l'éducation scolaire des vedettes et ils ne doivent théoriquement plus être soumis à des régimes extrêmes. Ça semble peu, mais pour le pays du matin calme, c'est un énorme pas en avant.

En définitive, ceux qui parlent le mieux de l'urgence de la situation, ce sont les idols eux-mêmes. BTS, NewJeans, Stray Kids, ITZY... Quelle que soit la génération de chanteurs, ils ont tous évoqué la question de la santé mentale. Et s'il y a bien une catégorie de personnes qui peuvent bien faire changer les choses, ce sont bien les stars.