L’influenceuse Ophenya est accusée de dérives inquiétantes avec ses jeunes fans

Ophenya, influenceuse adorée par des millions d’ados, est désormais dans le viseur de la justice. Entre relations toxiques et dérives inquiétantes, l’idole des réseaux sociaux dévoile un visage bien plus sombre.

Écrit par Camille Cortot le

Ophenya, de son vrai nom Ophélie Vincent, est une figure incontournable de TikTok, où elle rassemblait près de 5 millions d’abonnés, avant que son compte soit banni. Un indice important du danger que peut représenter la jeune femme.

Adolescents en quête de repères, jeunes filles fascinées par son aura, ou simples curieux, son public la voit comme une grande sœur bienveillante. Mais derrière cette image se cachent des pratiques et comportements qui inquiètent au plus haut point.La Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) a récemment signalé l’influenceuse au parquet de Paris, déclenchant une polémique importante.

Ophenya : Une "grande sœur" trop envahissante

@ludivine.lsnn#devinelapersonne#meetup#lyon#ophe#rencontre @Ophenya ♬ Car's Outside - James Arthur

Dans l’univers d’Ophenya, tout est fait pour créer un lien fusionnel avec ses abonnés, qu’elle appelle affectueusement ses " bgnyas ". Cette proximité va bien au-delà des simples interactions sur les réseaux sociaux. Rencontres organisées, messageries privées, présence constante : Ophenya offre à ses fans un accès exclusif à son monde, brouillant dangereusement les frontières entre influenceuse et amie intime.

Lors d’un meet-up en avril 2024, des centaines d’adolescents ont patienté des heures pour quelques minutes d’échange. Ces moments, bien qu’intenses pour les fans, laissent certains dans un état de dépendance émotionnelle. 

Cette proximité inquiète depuis longtemps des collectifs comme M.E.E.R (Mouvement pour l’Éveil et l’Éducation à la Résistance sur les réseaux), qui dénoncent une relation de codépendance malsaine. En effet, Ophenya ne se contente pas de répondre à ses fans en journée : des échanges privés ont lieu parfois en pleine nuit. L’influenceuse utilise également un langage affectueux, voire ambigu, qui, selon certains observateurs, serait jugé nettement plus problématique si elle était un homme.

L’application controversée qui a tout déclenché

@laulevy Ophenya : une énième influvoleuse ? En tout cas, l’application dont elle fait la promotion est très dangereuse et devrait être supprimée !! #ophenya#crush#mineurs#danger#protectiondesmineurs#prevention♬ son original - Laurène ✨

Le signalement à la justice ne concerne pas uniquement ses interactions avec ses abonnés. L’application Crush, qu’Ophenya promouvait activement avant qu’elle ne soit rebaptisée Friendzy, est également au cœur de la polémique. Présentée comme un espace sécurisé pour aider les 10-21 ans à gérer leurs émotions et leurs relations, elle est rapidement devenue un lieu potentiellement dangereux.

Pourquoi ? D’abord, parce qu’elle permettait à des adultes de 20 ans d’interagir avec des mineurs de 12 ans, sans vérification stricte de l’âge des utilisateurs. Ensuite, parce qu’elle favorisait des échanges entre des profils très différents, ouvrant la porte à des comportements inappropriés, voire à des dérives criminelles. Le manque de transparence autour du partenariat entre Ophenya et l’application, qu’elle n’avait pas initialement mentionné, n’a fait qu’aggraver les soupçons.

Les dérives sectaires : un phénomène de plus en plus visible

Le concept de dérive sectaire, bien qu'il puisse sembler exagéré dans certains cas, est bel et bien une réalité. Les autorités, comme la Miviludes, surveillent de plus en plus les comportements de certaines personnalités publiques, afin d’éviter que des adolescents ne tombent sous l'emprise d'un groupe ou d'un individu.

Les dérives sectaires n'impliquent pas forcément des cultes ou des pratiques occultes, mais bien des rapports de pouvoir où l'influenceur prend la place d'un leader qui guide et oriente ses abonnés vers des comportements et croyances potentiellement dangereuses. Les réseaux sociaux ont exacerbé ce phénomène, car ils offrent une plateforme où des individus peuvent construire une audience massive et exercer une influence disproportionnée.

Une influence toxique sur une jeunesse vulnérable

Le problème ne s’arrête pas à Ophenya. Son cas illustre une tendance plus large sur les réseaux sociaux : l’aveuglement des jeunes face à des figures d’autorité numériques. Près de 40 % des utilisateurs de TikTok affirment faire confiance aux influenceurs populaires, souvent simplement parce qu’ils ont beaucoup d’abonnés. Cette crédulité, associée à une capacité d’analyse critique chez les adolescentsqui est en construction, rend cette tranche d’âge particulièrement vulnérable aux dérives.

Les jeunes, aujourd’hui massivement présents sur les réseaux dès l’âge de 10 ans, forment une audience très influençable. Ils voient en leurs influenceurs préférés des modèles à suivre, absorbant leurs conseils, leurs idées, leurs opinions. Dans le cas d’Ophenya, ce lien étroit a permis de normaliser une relation parasociale particulièrement envahissante.

Une question de responsabilités

Le signalement d’Ophenya marque un tournant dans la régulation des influenceurs sur les réseaux sociaux. Les figures présentes sur les réseaux sociaux, qu’elles le souhaitent ou non, ont un rôle éducatif implicite auprès de leur communauté.

Le débat dépasse désormais le cas de cette influenceuse. Il pose la question cruciale de la responsabilité des plateformes, des collectifs de prévention, mais aussi des parents face à des pratiques qui exposent les jeunes à des contenus toxiques ou dangereux. Les cas problématiques qui poussent des adolescents dans des dérives dangereuses se multiplient sur la plateforme. Le mois dernier, une mère a porté plainte contre TikTok après le suicide de sa fille en 2021. Elle accuse le réseau social d’avoir accentué la détresse psychologique de l’adolescente avec son algorithme.

Le parquet de Paris a désormais la lourde tâche de trancher. Si les accusations sont avérées, elles pourraient bien redéfinir les limites de l’influence en ligne, et celles des réseaux sociaux.

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